La Seconde Guerre Mondiale

La guerre se prépare

Le vendredi 1er septembre 1939, l’ordre de mobilisation générale tomba, avec pour conséquence l’évacuation des populations riveraines du Rhin. A Attenschwiller, ce jour-là, les gendarmes se présentèrent chez le maire, M. Philippe SUTTER, porteurs d’un ordre d’évacuation immédiate : le village devait être évacué avant la tombée de la nuit ! Tout le monde croyait à une attaque allemande imminente sur le Rhin. L’ordre était transmis à la population par l’appariteur au son du tambour. La radio le rappelait en permanence. Les réactions étaient multiples et diverses. Les anciens, ceux qui avaient déjà vécu 1870 puis 1914-18, n’en revenaient pas. Une troisième guerre allait leur tomber dessus. Une nouvelle fois, l’Alsace en serait l’enjeu.

L’exode

D’un commun accord le départ fut fixé au lendemain matin 6 heures. Le maire ayant eu une permission de 15 jours va accompagner les Alsaciens tout au long du voyage. Les jeunes couples se séparaient, désespérés, le mari rejoignant son régiment, l’épouse fuyant vers… l’inconnu, avec des parents âgés, de jeunes enfants, voire des bébés à naître.

Nombreuses furent les charrettes à bras, les remorques, les bicyclettes surchargées. Bagages autorisés : 30 kg par personne. On emportait des vivres pour trois jours, un minimum de linge, son argent dans une sacoche confectionnée en hâte et portée autour du cou, sous les vêtements. Il fallait tout laisser : biens, meubles, volailles et lapins, chiens et chats, le gros bétail et les récoltes tout juste engrangées. Les bêtes, libérées de leurs chaînes, erraient dans les rues et les cours de ferme, images inoubliables pour des gens de la terre.

Dans le train

Après deux jours d’errance et d’incertitude à Altkirch, après deux nuits de mauvais sommeil sur de la paille, ce fut le départ en train. Bien des objets trop encombrants durent encore une fois être abandonnés. Beaucoup de personnes sont en fait retournées en vélo dans leur village pour rechercher des objets de valeur afin que les soldats ne les pillent pas. Chevaux, bœufs et vaches restaient dans les prés. Les gens montaient dans les trains composés essentiellement de wagons à bestiaux à raison de vingt à trente personnes par wagon. Les rares wagons-voyageurs de 3ème classe au confort très précaire étaient réservés aux invalides, handicapés et enfants en bas âge.

Les soucis et les incertitudes s’amplifiaient au fil du voyage. Deux jours et deux nuits de train, des arrêts innombrables pour laisser la priorité aux convois de l’armée remontant vers le nord.

Enfin, le 5 septembre, en gare d’Aire-sur-Adour, dans les Landes, l’ordre de descendre du train avec tous les effets personnels est donné.

Dans les Landes

C’est dans l’après-midi du 9 septembre 1939 que dans l’arène de Gabarret les 440 réfugiés d’Attenschwiller attendaient qu’il fut décidé de leur sort. Car rien n’était prévu de la part des autorités. Et c’est là qu’est intervenu l’esprit d’initiative du maire Philippe SUTTER, de la municipalité de Gabarret et de ses habitants qui en quelques heures sont parvenus à loger ces réfugiés hâves, épuisés, désemparés au cinéma, dans les fermes abandonnées, au restaurant, chez l’habitant et au besoin dans des garages. Le maire ne restera que 15 jours dans les Landes, car il devra revenir à Belfort où il sera incorporé.

Etonnement des Gabardans de voir débarquer tout ce monde parlant un idiome incompréhensible rappelant fâcheusement les accents d’outre-Rhin, haussement d’épaule à chaque question posée. Qui étaient donc ces gens qu’il fallait accueillir ? Ils savaient bien que le traité de Versailles signé en 1919 avait redonné à la France l’Alsace et la Lorraine.

Des Attenschwillerois dans les Landes en 1940

L’histoire nous apprend que durant les cinquante années d’annexion à l’Allemagne à partir de 1870, celle-ci avec détermination et constance avait éliminé tout ce qui aurait pu contribuer à la sauvegarde de la langue française. Et ce n’est pas en deux décennies que l’on récupère ce qui a été banni durant deux générations. Toutefois, de 1919 à 1939, on apprenait bien le français à l’école, mais les plus âgés ne l’ont plus fréquentée.

Surprise aussi des Attenschwillerois, impressionnés par l’immensité de la forêt landaise, la richesse du terroir, les galoches, les bérets basques.

Monsieur FAGET, maire de Gabarret à l’époque, dut porter sur ses épaules le poids de responsabilités immenses afin de faire cohabiter harmonieusement la population locale avec les nouveaux venus. Et cette cohabitation s’organisa rapidement, beaucoup mieux que l’on pouvait s’imaginer. Les Landais avaient déjà accueilli beaucoup de réfugiés espagnols chassés par la guerre civile de 1936-37. Les Landais firent preuve d’une fraternelle hospitalité, comme en témoigne le récit de M. Marcel WIEDERKEHR.

107 familles comptant 368 personnes restèrent à Gabarret tandis que 20 familles représentant 72 personnes choisies au hasard trouvèrent refuge dans une commune voisine : Herré.

Les jeunes eurent rapidement de l’occupation dans l’agriculture, à la scierie ou dans la forêt pour résiner les pins. Ainsi, durant un an, précisément jusqu’au 23 septembre 1940, les Attenschwillerois vécurent à l’heure de Gabarret, partageant les joies et les peines de ceux qui étaient devenus leurs amis. Trois Attenschwillerois ont vu le jour dans la ville de Montfort.

Le retour

Très vite, la guerre prit le dessus. Ce fut l’invasion, la débâcle et l’arrivée des Allemands même dans les Landes. L’occupant décrète le rapatriement des évacués Alsaciens.

Nombreux furent ceux qui refusaient le retour au pays. Mais les personnes qui étaient toujours très attachées à leur existence en Alsace rentraient, prêts à affronter une fois de plus l’occupant allemand. Arrivés au village, déception et colère des évacués : les maisons étaient encore occupées par des soldats allemands. Les Attenschwillerois furent donc contraints de cohabiter avec les soldats. Le village fut cependant peu influencé par les faits de la guerre, bien que, en mai 1940, les villages voisins de Wentzwiller et Buschwiller furent touchés par des tirs d’artillerie allemande.

La libération

Durant quatre années, l’Alsace annexée était livrée à l’ennemi qui s’appliquait consciencieusement à germaniser les villes et les campagnes. Enfin, les 19 et 20 novembre 1944, la région fut libérée de manière étonnement rapide par les troupes de la 1ère Armée Française venant de Belfort qui se sont avancées jusqu’au Rhin. Une rue et une place d’Attenschwiller furent récemment baptisées en l’honneur de cet événement.

Seize hommes étaient tombés au champ d’honneur de cette guerre.


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